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Répertoire
Philippe Henne
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Noël : messe de l'Aurore

Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu

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Peinture réalisée par des artistes philippins exposée lors d'une exposition d'art sacré à la cathédrale de Manille en 2016© Lawrence Lew, OP

Les bergers quittèrent la crèche,

presque à regret, mais il fallait reprendre le travail, trouver les brebis, chercher les égarées, reprendre les longues journées de garde et les longues nuits de veille. Mais qu’ont-ils donc vu, ces êtres frustres, plus habitués à supporter la chaleur du jour et la froidure de la nuit qu’à se rassembler ainsi à minuit autour d’un enfant endormi ? Ils avaient pourtant bien chaud au coeur avec le sentiment d’avoir vu quelque chose de beau, quelque chose de grand.

Au début, ils étaient un peu déçus.

L’ange leur avait promis un Sauveur, le Christ, le Seigneur. Ils pensèrent voir un puissant homme de guerre ; c’était un bébé, tellement petit, tellement fragile qu’une mauvaise grippe pouvait l’emporter. Ils s’étaient attendus à entrer dans un palais ; c’était une crèche. Ils craignaient de devoir rencontrer des soldats armés, prêts à reconquérir l’indépendance de la Judée et de la Samarie. Ils n’ont trouvé qu’une femme qui venait d’accoucher et un homme qui s’affairait autour d’elle et leur enfant. Il n’y avait là rien d’exceptionnel.

N’est-ce pas ce que nous vivons, nous aussi, un peu chaque année, lorsque nous célébrons la fête de Noël ? Les vitrines sont toutes illuminées. Elles annoncent de bons repas et de beaux cadeaux. Et nous nous retrouvons parfois seuls, parfois en famille, avec un peu de crainte devant une possible dispute ou un peu d’ennui devant l’effort à fournir : avoir l’air joyeux. La maîtresse de maison s’est activée toute la journée pour préparer quelque chose de bon, mais elle est fatiguée et il ne faut pas l’énerver. Les enfants s’approchent, les plus petits impatients de découvrir les cadeaux, les plus grands déjà plus blasés et, comme toujours, mal dans leur peau.

Et le miracle peut se produire : tout le monde dépose les armes et fait un effort pour partager la joie et l’espérance de Noël.Au lieu d’attendre, chacun commence à s’intéresser à l’autre et à échanger avec lui.

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Peinture, chapelle des bergers à Bethléem © Lawrence Lew, OP

Les bergers eux aussi s’étaient laissés toucher par ce charmant spectacle : un enfant, un nouveau-né qui dort les poings fermés. Ils l’avaient tout d’abord regardé avec un peu de surprise : ce n’était pas le roi annoncé. Il y avait même un berger qui avait poussé les autres pour voir ce phénomène. Et le miracle s’est opéré. Ils ne pensaient plus à une libération politique, ils goûtaient la beauté de la vie. Le petit nourrisson paraissait comme lumineux avec son visage blanchâtre. Il semblait rayonner d’une paix que tout le monde autour de lui pouvait partager. Tous étaient en effet touchés par ce cadeau que Dieu leur faisait : accueillir une nouvelle vie.

C’est pour cela que les bergers repartirent en glorifiant Dieu pour ce qu’ils avaient vu : une nouvelle promesse de vie et d’amour qui surgissait dans la nuit de Noël.

C’est ce que nous célébrons tous les dimanches, si nous le voulons : redécouvrir la présence de Dieu au milieu de notre vie. Cette présence, elle est fragile comme un enfant qui vient de naître, elle est blanche comme l’hostie que nous allons recevoir. Mais, au-delà de cette fragilité et de cette blancheur, c’est toute la tendresse d’une caresse et toute la chaleur d’un amour divin qui nous est offert.

Repartons donc comme les bergers avec cette joie intérieure : nous avons vu le Christ, le Messie, le Sauveur du monde.

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© Lawrence Lew, OP